Pour cet extrait, vous pourrez découvrir - dans l'ordre - :

une traduction littérale française juxtalinéaire, puis le texte latin et enfin la traduction littéraire française de Maurice CROISET.

 

Salluste y décrit la nature humaine telle qu'il la perçoit.

(Traduction juxtalinéaire)

I. Decet

omnis homines,

qui student sese præstare

ceteris animalibus,

niti summa ope

ne transeant uitam

silentio,

ueluti pecora,

quæ natura finxit

prona

atque oboedientia uentri.

Sed nostra uis omnis

sita est

in animo et corpore :

utimur magis

imperio animi,

seruitio corporis ;

alterum

est commune nobis cum dis,

alterum

cum belluis.

Quo uidetur mihi

esse rectius

quærere gloriam

opibus ingenii

quam uirium,

et, quoniam uita

qua fruimur

est breuis ipsa,

efficere memoriam nostri

quam maxume longam :

nam gloria diuitiarum

et formæ

est fluxa atque fragilis,

uirtus habetur

clara æternaque.

Sed magnum certamen

fuit diu inter mortalis,

resne militaris

procederet magis

ui corporis

an uirtute animi :

nam opus est

et consulto,

priusquam incipias,

et facto mature,

ubi consulueris ;

ita utrumque,

indigens per se,

eget

alterum auxilio alterius.

 

I. Il-convient

(que) tous les-hommes,

qui ont-à-cœur eux-mêmes l'-emporter

(sur) tous-les-autres animaux,

s’-efforcent (par) le-plus-grand effort

pour-qu’(ils) ne passent pas la-vie

(dans) le silence (= l’obscurité),

comme les-brutes,

que la-nature a-faites

penchées-en-avant

et obéissant à-leur-ventre (= à leurs appétits).

Mais notre être complet

est situé (= consiste)

dans une-âme et un-corps :

nous-nous-servons davantage

du-commandement de-l’-âme,

(et) de-l’esclavage du-corps ;

l’un (= le commandement de l’âme)

est commun à-nous avec les-dieux,

l’autre (= l’esclavage du corps)

avec les-bêtes.

C’-est-pourquoi il-semble à-moi

être plus-juste

(de) rechercher la-gloire

par-les-ressources de-l’-esprit

que (par celles) des-forces-du-corps,

et, puisque la-vie

dont nous-jouissons (naturellement),

est courte elle-même (= par elle-même),

(de) rendre la-mémoire de-nous

le-plus possible longue :

car la-gloire des-richesses

et de-la-beauté

est glissante et fragile,

(mais) le-mérite est-possédé

éclatant et-éternel.

Pourtant (un) grand débat

fut longtemps entre les-mortels,

(pour savoir) si la-chose guerrière

réussissait plus

par-la-force du-corps

ou par-l’-énergie de-l’-âme :

car besoin est

et de-délibération,

avant-que tu-commences,

et d’action-faite promptement (= d’exécution prompte)

dès-que tu-auras-délibéré ;

ainsi l’-une-et-l’-autre (force),

insuffisante par soi-même,

a-besoin

l’-une du-secours de-l’-autre.


(Texte latin)

I. Omnis homines, qui sese student præstare ceteris animalibus, summa ope niti decet uitam silentio ne transeant, ueluti pecora, quæ natura prona atque uentri oboedientia finxit. Sed nostra omnis uis in animo et corpore sita est : animi imperio, corporis seruitio magis utimur; alterum nobis cum dis, alterum cum belluis commune est. Quo mihi rectius esse uidetur ingenii quam uirium opibus gloriam quærere, et, quoniam uita ipsa qua fruimur brevis est, memoriam nostri quam maxume longa efficere : nam diuitiarum et formæ gloria fluxa atque fragilis est, uirtus clara æternaque habetur. Sed diu magnum inter mortalis certamen fuit, uine corporis an virtute animi res militaris magis procederet : nam et, priusquam incipias, consulto, et, ubi consulueris, mature facto opus est; ita utrumque, per se indigens, alterum alterius auxilio eget.

(Traduction littéraire, de Maurice CROISET)

I. Tout homme qui aspire à se distinguer du reste des animaux doit faire tous ses efforts pour ne point traverser silencieusement la vie, comme la brute que la nature a courbée vers le sol et asservie à ses appétits. Notre être, à nous, n’est complet que par l’ensemble d’une âme et d’un corps : par l’âme, nous sommes plus maîtres ; par le corps, plus esclaves : maîtres, avec les Dieux ; esclaves, avec les bêtes. Aussi me semble-t-il plus raisonnable de tendre à la gloire par les facultés de l’erit que par les forces du corps, et, puisque par elle-même la vie dont nous jouissons est courte, d’assurer à notre mémoire la plus longue durée possible : car la gloire que donnent les richesses et la beauté est passagère et fragile ; le mérite, au contraire, est un bien éclatant, impérissable. Cependant ce fut longtemps l’objet d’un grand débat parmi les mortels, que de savoir laquelle des deux, de la force du corps ou de l’énergie de l’âme, contribuait le plus au succès militaire : c’est qu’en effet il faut, avant l’engagement, de la réflexion ; après la réflexion, de la promptitude dans l’exécution ; et ainsi l’une et l’autre force, insuffisantes isolément, ont besoin de se prêter un mutuel appui.